Une diversité de médias pour un mouvement social qui se diversifie ?
Féminismes : loin du mainstream
Quand les médias mainstream [1] les ignorent, par quels moyens les mouvements sociaux développent-ils leur communication ? Le cas du féminisme, ou plutôt des féminismes, puisque ce mouvement s’est incroyablement diversifié ces dernières années, montre que les alternatives aux grands médias foisonnent quand les activistes veulent se faire entendre. De Youtube aux Tumblr [2] en passant par la photographie ou la bande dessinée, les militant.e.s féministes ont plus d’un tour dans leur sac !
Quand le féminisme n’a pas bonne presse
Féminisme : un mot encore aujourd’hui difficile à prononcer et à comprendre pour certain.e.s, mais surtout un mouvement souvent réduit à des « buzz » dans la presse et les médias mainstream. On se rappelle notamment la grande couverture médiatique qu’avaient reçue les « Femen » ou encore de la polémique autour de Beyoncé qui avait affiché le mot « Feminist » lors des Video Music Awards de MTV en 2014. Ces buzz médiatiques ne permettent en général pas de comprendre le mouvement féministe, ses luttes et son intérêt pour la société. La féministe reste d’ailleurs dans l’imaginaire populaire une femme frustrée, hargneuse, refusant d’assumer sa « féminité », comme le montre encore les nombreux commentaires et opinions sur Twitter et Facebook. Pourtant, le féminisme est un mouvement social qui a permis aux femmes, lors de la 1ère vague (1830-1948) d’accéder à des droits fondamentaux comme le droit de vote et le droit à l’éducation. Et lors de la 2e vague de libérer les corps des femmes (contraception, avortement) et de remettre en question les rôles assignés aux femmes et aux hommes. Aujourd’hui, en Belgique, les hommes et les femmes sont globalement égaux devant la loi (bien que plusieurs lois soit encore perfectibles, comme les congés parentaux). Cependant, dans les faits, les inégalités entre hommes et femmes sont encore très marquées (plafond de verre, inégalités salariales, violence conjugale, harcèlement, discrimination à l’embauche, domaines difficilement accessibles selon son sexe ou son origine...) à cause de mécanismes sociaux très puissants (traditions et coutumes, stéréotypes, normes sociales différentes selon qu’on est homme ou femme, etc.).
La 3e vague du féminisme dont on situe le début dans les années ’90, s’attache à déconstruire les mécanismes sociaux qui entravent encore le chemin vers l’égalité. Lors de la Journée Internationale des Droits des Femmes, les médias d’information [3] soulignent généralement les inégalités persistantes mais ne mentionnent pas le féminisme ou les associations féministes, alors que c’est ce mouvement et ces associations qui luttent au quotidien pour défendre les droits des femmes. Les médias et la presse ne parviennent pas non plus à expliquer la nature systémique des inégalités qu’ils dénoncent. Par exemple, montrer une femme cadre qui a réussi sa carrière professionnelle tout en étant mère, comme c’est le cas dans le JT de BX1 du 8 mars 2016 [4], ne permet pas d’expliquer les mécanismes qui empêchent les autres femmes de percer le plafond de verre et pourraient même renforcer l’idée que c’est une question de choix et de parcours individuel, s’il n’y a pas une recontextualisation. S’attacher à la success story (histoire qui finit bien) d’un personnage est un biais fréquent dans les fictions et au cinéma, mais les journaux télévisés qui ont pour vocation de décoder et informer sur la société et le monde actuel devrait être en mesure d’articuler l’histoire individuelle avec le phénomène social plus large. Au-delà de la difficulté des médias à expliquer les inégalités systémiques, il y a aussi régulièrement une confusion entre la réussite d’une femme dans un domaine et le féminisme. Par exemple sur le site web de La Libre, la recherche du mot-clé « féministe » mène à plusieurs articles qui ne contiennent pas ce mot mais racontent simplement la réussite ou le parcours d’une femme.
Le féminisme ou les féminismes
Si les médias à large audience (ou mainstream) peinent à expliquer la complexité des phénomènes menant aux inégalités, ils semblent également incapables de retranscrire la complexité des mouvements qui luttent contre ces inégalités. Le cas du féminisme est un très bon exemple, puisque depuis 1990, le mouvement s’est diversifié et complexifié. Il inclut maintenant les femmes qui étaient jusqu’à alors ignorées par les féministes majoritairement blanches, hétérosexuelles et bourgeoises des 1ères et 2e vagues, mais il recouvre également une multitude de courants idéologiques allant du féminisme libéral au féminisme socialiste en passant par le féminisme radical [5] mais aussi l’afro-féminisme ou le féminisme lesbien. Il est aujourd’hui plus correct de parler de féminismes au pluriel qu’au singulier. Pourtant, les médias mainstream font la plupart du temps l’impasse sur cette complexité. On peut se rendre compte de cela notamment en observant les descriptions de femmes féministes, qui sont rarement détaillées alors que deux féministes peuvent avoir des conceptions idéologiques totalement opposées.
Le féminisme dans les médias, un mouvement du passé ?
Comme énoncé plus haut, le féminisme actuel est de façon générale peu ou mal représenté dans la plupart des médias d’informations. Du côté des fictions populaires, il existe de nombreux films ou séries qui mettent en avant le féminisme et ses luttes, comme « Les suffragettes » (2015) ou « Downton Abbey » (2010). Mais la particularité de ces productions est de parler du féminisme au passé en se concentrant plutôt sur les luttes de la 1ère ou de la 2e vague. Cette insistance médiatique à mettre en avant les luttes passées du féminisme plutôt que les luttes actuelles peut donner l’impression que le mouvement est démodé voir inutile de nos jours. Dernièrement, de nouvelles séries tendent à nous prouver le contraire en mettant en scène des femmes qui doivent lutter contre les stéréotypes ou dans des milieux professionnels masculins et hostiles aux femmes comme c’est le cas dans « Borgen » ou « The Good Wife » sans que ces personnages ne se proclament forcément féministes. De plus, ces deux exemples sont assez édifiants puisqu’ils montrent le parcours de femmes blanches, hétéro et plutôt bourgeoises et posent la question de la représentation des féministes racisées [6] (voir ci-dessous). On peut aussi relever que si une grande partie des luttes féministes actuelles ne sont pas relayées par les médias, certaines luttes féministes actuelles ont quand même réussi à être médiatisées, comme par exemple les inégalités salariales et la difficulté à accéder à des hautes fonctions. La preuve en est l’expression « plafond de verre » qui est aujourd’hui comprise et utilisée par tous et toutes. Par contre, d’autres luttes restent encore invisibles comme les effets spécifiquement féminins des coupes budgétaires dans la sécurité sociale ou du manque de crèche.
L’articulation entre le sexisme et le racisme : en dehors des radars médiatiques
Quand il est question de féminisme, deux phénomènes récurrents peuvent être observés. Le premier phénomène relève de l’orientalisme et d’une exotisation de la violence, qui se traduit par le fait que les médias mainstream dénoncent plus facilement les violences contre les femmes quand elles ont lieu à l’étranger. Certains pays sont ainsi présentés comme naturellement patriarcaux et violents envers les femmes, ce qui laisserait entendre implicitement que les nôtres ne seraient pas ou plus patriarcaux [7]. Ce constat est particulièrement visible dans les fictions au cinéma : la plupart des films qui mettent en scène une héroïne se rebellant contre le patriarcat se produisent dans un pays étranger ou dans une famille immigrée. Parmi les nombreux exemples récents, on peut citer notamment Difret (Zeresenay Mehari, 2015), Mustang (Deniz Gamze Ergüven, 2015), L’Homme qui répare les femmes (Thierry Michel, 2015) ou encore Fatima (Philippe Faucon, 2015) [8]. Ce phénomène est également observable dans les médias d’information : il suffit de comparer le traitement médiatique autour du burkini et de la violence conjugale pour le comprendre. L’affaire autour du burkini concerne une poignée de femmes mais a rempli des pages entières de journaux pendant tout l’été, majoritairement présenté comme une atteinte aux libertés de la femme, quand bien même les principales intéressées clamaient leur liberté de s’habiller comme elles l’entendaient. Le sujet des violences conjugales, qui concernent un couple sur huit [9] et une femme sur cinq en Europe [10] n’est que très rarement traité (souvent à l’occasion de la journée des droits de la femme) alors qu’il a de très graves conséquences (physiques et psychologiques) sur les femmes.
Cet exemple introduit également le deuxième phénomène qui est récurrent quand les médias parlent de féminisme : dans l’affaire du burkini, les médias n’ont que très rarement relayé la parole des femmes racisées et ont directement assumé que celui-ci leur était imposé par les hommes alors même que dans de nombreux blogs, tweets et posts Facebook, celles-ci revendiquaient le droit à choisir leur tenue vestimentaire. Sans entrer dans cette polémique complexe, il est frappant de constater l’absence de femmes racisées quand on parle d’elles. La tendance des médias à ignorer les femmes ne concerne pas que les femmes racisées, puisque dans la presse quotidienne, en 2015, les femmes restent minoritaires [11] mais les femmes racisées doivent souvent affronter la double peine du racisme et du sexisme. Elles apparaissent rarement dans les médias. Quand aux féministes racisées, elles sont carrément absentes. Le terme afro-féminisme n’est mentionné sur aucune page de plusieurs sites webs d’information comme www.levif.be ou www.lesoir.be, pourtant ce mouvement qui vise à défendre les femmes noires a pris de l’ampleur ces dernières années. Plusieurs groupes Facebook (comme MWASI – Collectif Afroféministe, Mwanamke - le premier Collectif Afroféministe belge ou Femmes Africaines Magazine) sont apparus pour répondre à la double oppression raciste et sexiste dont sont victimes les femmes noires mais aussi pour défendre des modèles de réussite plus diversifiés.
Face aux médias mainstream , une multitude de médias alternatifs
Face à l’incapacité des médias généralistes et grand public à rendre compte de la réalité des mouvements féministes, de nombreuses initiatives spontanées ont émergés sur la toile et ailleurs. Les militant.e.s y parlent de leurs luttes et sensibilisent aux problématiques féministes. Ces productions prennent des formes multiples et peuvent aller des initiatives professionnelles (par exemple, la presse associative avec des magazines mensuels comme Axelle Mag ou Femmes Plurielles) aux initiatives moins formelles (par exemple des groupes Facebook, des blogs ou des tumblr).
Dans les initiatives bénévoles, on retrouve beaucoup de blogs et tumblr qui s’attachent à expliquer certains concepts du féminisme et à décrypter des phénomènes sociaux, mais aussi à témoigner des violences subies, comme la blogueuse Jack Parker qui dénonçait le harcèlement de rue dont elle était victime sur son tumblr crackrockmountain en 2014. Les tumblr, hashtags et tweets sont également très utilisés pour rassembler les témoignages de femmes concernant certains phénomènes dont les médias ne parlent pas, comme le harcèlement sexiste dans l’espace public (Tumblr Paye ta shnek), le harcèlement au travail (Tumblr Paye ton taf), les discriminations dans les cours de sport (Tumblr Paye ton sport) ou le sexisme des gynécologues avec le hashtag #payetonutérus apparut en 2014 sur Twitter. Le fait d’amasser une quantité importante de témoignages concernant une même discrimination, en utilisant les réseaux sociaux, permet de montrer l’importance du phénomène, qui est souvent minimisé ou non-reconnu par les médias et permet de transformer une expérience vécue de façon individuelle par de nombreuses femmes en un problème de société auquel il faut s’attaquer.
Ce passage de l’individuel au collectif se faisait dans les années ’60 dans des groupes de paroles non-mixtes, ce n’est donc pas une nouveauté mais les réseaux sociaux et Internet permettent aujourd’hui de collectiviser encore plus rapidement les témoignages, sans barrières spatiales et avec l’anonymat pour les femmes qui ne souhaitent pas s’exposer. De plus, les groupes de paroles féministes des années ’60 devaient mettre en place de nombreuses stratégies pour relayer leurs messages dans les médias. Aujourd’hui grâce aux réseaux sociaux, les témoignages deviennent rapidement visibles et accessibles à tous. Cette visibilité accrue peut mener à une prise en main du sujet par les médias grand public, comme ça avait été le cas par exemple avec le documentaire de Sofie Peeters sur le harcèlement de rue à Bruxelles. Ce documentaire avait reçu une grande attention médiatique, et avait conduit à une nouvelle loi visant à infliger une amende administrative aux harceleurs (ce qui dans les faits n’a pas d’impact sur la problématique).
Cet engouement médiatique pour le sujet est questionnable et semble renforcer le constat de l’exotisation des violences contre les femmes par les médias. En effet, bien que l’autrice ait insisté sur le fait que le harcèlement de rue n’était pas « une question d’origine ethnique mais sociale [12] », plusieurs journaux ont mis en avant l’origine maghrébine des harceleurs (comme le journal La Capital [13]), laissant supposer que les autres hommes ne feraient pas preuve de machisme. Les groupes Facebook de féministes sont également très actifs pour dénoncer des injustices ou des disfonctionnements de la société comme la page Je suis une pub sexiste qui recense les publicités sexistes ou la page Féminicide par compagnon ou ex qui recense les meurtres de femmes commis dans le cadre conjugal. D’autres groupes visent plutôt à débattre de questions de fond comme le Cercle Féministe de l’ULB.
Les productions militantes, une littérature fiable !
L’usage de la bande dessinée et de l’illustration est très fréquent pour vulgariser certains concepts plus compliqués, comme le viol (Blog « Dans mon tiroir »), le genre (voir La théorie du genre (djendeure) sur le blog Insolente Veggie de Rosa B.), le victim blaming (Blog « Dans mon tiroir ») ou encore la culture du viol et l’importance de la représentation dans les médias (voir le blog de Miron Malle et notamment ses article sur la culture du viol dans le film « Seize bougies pour Sam »,sur l’impunité des hommes célèbres ou sur la représentation dans les médias). La bande dessinée est également utilisée par Pénéloppe Bagieu pour faire connaître des pans de l’histoire des femmes qui ont été oubliées par les livres d’histoire dans son blog « Les culottées ». Elle y retrace le parcours de vie de figures féminines fortes comme Peggy Guggenheim (amoureuse de l’art moderne), Mae Jemison (astronaute et première femme noire à être allée dans l’espace), Naziq al-Abid (activiste de bonne famille) ou encore Hedy Lamarr (actrice et inventrice).
Ce dernier exemple est très représentatif de la 3e vague du féminisme puisque Pénéloppe Bagieu s’attache à montrer différents chemins de vie et à inclure des femmes de toutes origines et de tout milieu. Ces initiatives arrivent parfois dans le monde hors-ligne avec la publication d’albums de bande-dessinée, comme c’est le cas pour l’album de Mirion Malle « Commando Culotte : les dessous du genre et de la pop-culture », l’album en deux tomes « Les culottées » de Pénéloppe Bagieu ou encore le projet « Les Crocodiles » de Thomas Mathieu. Ce dernier projet était à l’origine un tumblr qui transcrivait en bande dessinée des témoignages sur le harcèlement de rue et les violences sexuelles et qui a ensuite été imprimé par les éditions Le Lombard. Thomas Mathieu a également illustré la bande-dessinée « Le Féminisme en 7 slogans et citations » qui retrace l’histoire du féminisme à partir de ses slogans les plus connus et qui a été écrit par Anne-Charlotte Hudson qui tient le blog féministe Ça fait genre. Les liens entre féminisme, blogs et bandes dessinées sont décidemment très étroits !
Les blogs et la bande-dessinée ne sont cependant pas les seuls moyens d’exprimer les luttes féministes : les chaînes Youtube sur le sujet foisonnent. Certaines chaînes sont plutôt humoristiques comme le Meufisme qui se moquent par exemple des diktats de beauté, d’autres plus explicatives comme la chaine de NAYA – La Ringarde qui explique l’afro-féminisme ou la chaine Feminist Frequency de Anita Sarkeesian qui analyse les représentations de la femme dans les jeux vidéo. Dans un genre encore plus militant, en 2014, Sonita Alizadeh, rappeuse afghane avait tourné le clip « Brides for sale » pour dénoncer le mariage forcé bravant l’interdiction de chanter pour les femmes en Iran [14], où elle résidait alors.
Contrairement à un préjugé tenace, les blogs et billets qu’on retrouve sur la toile, qu’ils soient militants ou de vulgarisation théorique, sont en général très bien référencés et d’une grande qualité. Par exemple, les billets du blog de « Dans mon tiroir » ou de Mirion Malle sont toujours suivis d’une note avec les références utilisées et des liens pour aller plus loin dans la réflexion. De même, les blogueuses/ blogueurs et youtubeurs/youtubeuses qui écrivent sur le sujet sont assez réactifs aux commentaires qu’ils/elles reçoivent et il n’est pas rare qu’ils ou elles rajoutent des informations à leur billet ou corrigent certaines choses si une erreur leur a été signalée.
La spirale du silence – Une théorie de l’opinion publique
Les réseaux militants et leurs productions médiatiques qui sont de plus en plus visibles sur la toile pourraient-ils être une façon de briser ce que la sociologue allemande Elisabeth Noëlle-Neumann appelle « la spirale du silence » ? Cette théorie de l’opinion publique s’intéresse à « l’influence des médias de masse et de l’opinion publique sur l’expression d’un point de vue. Sensible à son environnement social, un individu lambda sera plus enclin à partager son opinion sur un sujet donné, si celle-ci est similaire à celle du plus grand nombre et relayée par les médias de masse. Dans le cas contraire, par peur d’être marginalisé, un individu taira plus facilement ses opinions. [15] » Les médias à large audience ne valorisant généralement pas les luttes féministes, on aurait pu, suivant cette théorie, imaginer que les féministes seraient peu nombreux.ses à faire entendre leur voix dans l’espace public. C’était sans doute le cas avant l’apparition d’internet car il était difficile de trouver des explications sur les concepts féministes et à cette époque, les opinions féministes restaient minoritaires.
Aujourd’hui, ces contenus sont de plus en plus accessibles à un grand public (vulgarisation par la bande dessinée, vidéos Youtube, etc.). Les théories féministes ne sont plus réservées à une franche minoritaire de la population. Les espaces en ligne féministes, comme les blogs, les tumblr ou les pages Facebook sont des lieux où les féministes peuvent échanger avec d’autres personnes qui partagent leur opinion et renforcer par là leur conviction. Si les féministes plus âgées soulignent l’impression qu’elles avaient d’être seules il y a encore une dizaine d’années, les nouvelles générations n’ont plus du tout ce sentiment puisque, même si leur entourage direct ne partage pas leur opinion, elles et ils ont accès à des témoignages et des productions qui les empêchent de se sentir isolé.e.s. Même si en dehors de ces sphères militantes, se déclarer ouvertement féministe reste une prise de position minoritaire et parfois pénible à assumer, on peut dire que la spirale du silence est en quelque sorte brisée grâce à la libération de la parole sur internet et à la visibilité accrue des blogs, tumblr et autres médias.
Est-ce que ce renforcement des opinions féministes par des productions militantes plus visibles pourrait provoquer un basculement du côté des médias de grandes audiences en passant de l’opinion présentée comme minoritaire à l’opinion majoritaire ? On remarque que certains d’entre eux commencent à s’emparer des questions féministes et à relayer quelques productions. Ainsi, la bd « Le féminisme en 7 slogans et citations » s’est retrouvée dans le Le coup de cœur de Myriam Leroydans l’émission Entrez sans frapper sur la radio publique La Première en octobre 2016. En novembre 2016, sur la même radio, Wahoub Faoumi, journaliste, se demandait s’il était possible d’être féministe et musulmane dans la Question du Monde : sa chronique répondait timidement par l’affirmative. Serait-ce une preuve qu’à force de documenter leurs idées, les mouvements militants arrivent à faire entendre leurs voix par les médias grands publics et à changer doucement l’opinion publique ? A vérifier dans quelques années !
Cécile Goffard
Décembre 2016
[1] Médias à large audience, médias de masse
[2] Sorte de blog
[3] Par exemple, les JT du 19h30 de la RTBF https://www.rtbf.be/auvio/detail_jt-19h30?id=2090474 et de 19h RTL du 8 mars 2016
[4] JT 12h30 de la chaine locale BX1 du 8 mars 2016 http://bx1.be/emission/journal-12h30-46/ consulté le 7 décembre 2016
[5] Louise Tourpin, Les courants de pensée féministe, http://bv.cdeacf.ca/bvdoc.php?no=84258&col=CF&format=htm&ver=old, consulté le 8 décembre 2016
[6] Nous utilisons ici le terme « racisé.e » pour désigner les personnes victimes de racisme, c’est-à-dire « les personnes (noires, arabes, roms, asiatiques, musulmanes, etc.) renvoyées à une appartenance (réelle ou supposée) à un groupe ayant subi un processus à la fois social et mental d’altérisation sur la base de la race. Les ‘racisé-e-s’ sont celles et ceux qui appartiennent (réellement ou non) aux groupes ayant subi un processus de ‘racisation’. » Définition issue de Rafik Chekkat. Consulté le 18 août 2016 sur http://www.etatdexception.net/ce-que-le-mot-racise-e-exprime-et-ce-quil-masque/
[7] Christine Delphy, « Antisexisme ou antiracisme ? Un faux dilemme », Nouvelles questions féministes, 2006/1 (Vol. 25), p. 78
[8] Voir à ce sujet : Daniel Bonvoisin et Cécile Goffard, La condition féminine unit-elle les cultures ? La réponse du cinéma, 9 septembre 2016 sur http://www.media-animation.be/La-condition-feminine-unit-elle-les-cultures-La-reponse-du-cinema.html
[9] Consulté le 12 décembre sur http://www.huitcouples.be/
[10] Consulté le 12 décembre sur https://www.amnesty.be/decouvrir-nos-campagnes/droits-des-femmes/violence-conjugale/article/chiffres
[11] On trouve moins de 18% de femmes dans l’information selon l’Etude de la diversité et de l’égalité dans la presse quotidienne belge francophone de l’AJP réalisée en mai 2015 et consulté le 12 décembre 2016 sur http://www.ajp.be/telechargements/diversite/diversite2015.pdf
[13] Ch. V., Femmes injuriées dans les rues de Bruxelles : "dans 95% des cas, ce serait par des Maghrébins" (vidéos), 27 juillet 2012, consulté le 10 décembre 2016 sur http://www.lacapitale.be/468479/article/regions/bruxelles/2012-07-26/femmes-injuriees-dans-les-rues-de-bruxelles-dans-95-des-cas-ce-serait-par-des-ma
[14] Pénélope Bagieu, Sonita Alizadeh (rappeuse), 2 mai 2016. Consulté le 12 décembre sur http://lesculottees.blog.lemonde.fr/2016/05/02/sonita-alizadeh-rappeuse/
[15] Elodie, La « spirale du silence » bâillonne aussi les réseaux sociaux, 28 août 2014. Consulté le 14 décembre sur http://www.journaldugeek.com/2014/08/28/spirale-du-silence-baillonnereseaux-sociaux/